Enseignements de la modélisation de l'estuaire
La construction du scénario d'intervention, s'est appuyée sur une analyse du fonctionnement passé et présent de l'estuaire pour bien comprendre l'origine des déséquilibres observés aujourd'hui.
L'analyse du fonctionnement passé et présent de l'estuaire a été menée à l'aide notamment de l'outil de modélisation hydro-sédimentaire en 3D de l'estuaire et a mis en évidence les enseignements suivants :
- Les grands aménagements du 19e et 20e siècle ont largement transformé l'estuaire : simplification de sa géométrie en un bras unique avec une forme en « entonnoir », approfondissement important sur sa partie aval. Du fait de ces transformations, la marée se propage maintenant très facilement jusqu'à Nantes (phase de flot). Les courants observés lors de cette phase sont plus forts qu'à la marée descendante (jusant).
Comparaison des vitesses de courant au flot et au jusant
- Ce déséquilibre dans le régime des courants est favorable au piégeage des sédiments dans le chenal de Nantes : les matériaux fins amenés par la marée repartent difficilement vers la mer, en dehors des périodes de crues de Loire.
- Lors des marées de morte eau, les courants sont plus faibles et les vases en suspension ont tendance à se déposer dans les zones profondes de l'estuaire, formant la « crème de vase », une couche visqueuse et lisse qui s'accumule dans les dépressions du fond, sur des épaisseurs pouvant aller jusqu'à plusieurs mètres. En plus de favoriser la remontée rapide de la marée dans l'estuaire en gommant les aspérités du fond, cette couche de crème de vase constitue un stock de sédiments fins qui est remis en suspension dès que les courants de marée augmentent de nouveau.
Répartition de la couche de crème de vase
- La présence marquée du sel dans l'estuaire joue également un rôle dans le piégeage des sédiments : les eaux en surface sont généralement moins salées que les eaux près du fond ; lorsque la différence de densité d'eau entre la surface et le fond est marquée (on parle alors de stratification des eaux), il se produit des courants sur le fond orientés vers l'amont, favorisant ainsi l'apport de matériaux fins depuis l'océan.